1818, l'atelier du monde

1818 est une date mystérieuse. Cette année-là, à Vienne, Ludwig van Beethoven se jette dans la composition d'une sonate pour piano, prodigieuse et révolutionnaire, la Hammerklavier en si bémol majeur. Quel cosmos a surgi en lui pour qu'il se remette à écrire, lui qui n'a rien produit, ou presque, depuis deux ans ? D'où vient cette orgie de notes, élégiaques ou explosives, qui métamorphosent tout notre univers musical ? Que veut-il nous dire, Beethoven, qui sonne encore à nos oreilles comme une explication ou un avertissement ?

Cette même année, à Madrid, l'autre grand sourd de l'Europe, Goya, ouvre lui aussi les portes de l'Atelier du monde. Il a troqué la toile pour le cuivre et grave les Disparates, contrepoint silencieux et halluciné de la sonate beethovienne.

Pulsions créatrices, imaginaires survoltés : en déchiffrant pour nous le fil de ces trajectoires éblouissantes, 1818 rend évidentes des affinités inattendues entre deux génies qui ont transgressé les limites de leur art et ouvert la voie au futur.