Fiche technique
Format : Broché
Nb de pages : 135 pages
Poids : 246 g
Dimensions : 14cm X 21cm
ISBN : 978-2-86231-473-0
EAN : 9782862314730
Et le jour sera pour moi comme la nuit
Quatrième de couverture
La narratrice perd soudainement la vue. Elle va devoir réapprendre chaque geste, patiemment, tenter de redevenir elle même tout en sachant quelle ne sera plus jamais la même. En ce sens elle explore ce que vivent tous ceux qui sont frappés de handicap et qui voient leur monde vaciller. À l'aune de ce malheur elle va revisiter son passé, en trouvant un sens nouveau aux événements qui ont échelonné sa vie. Ce récit très fort et très sensible interroge la question de l'image qu'on se construit pour survivre à une réalité souvent cruelle, l'image qu'on veut donner aux autres et celle qui nous échappe. Mais c'est aussi une ode formidable à la littérature et à la force des mots puisque, quand on ne voit plus, seul le langage peut nous permettre d'appréhender le monde.
« À mesure qu'elle rétrécit, la bulle noircit. C'est maintenant une grosse tique installée dans mon champ de vision, dotée de deux petits crochets noirs sur son bord supérieur. J'apprends à la contourner, à glisser mon regard au-dessous ou au-dessus d'elle, pour voler des aperçus. J'arrive même à déchiffrer des texto si je place mon portable contre ma poitrine, je ne vois toujours pas les visages mais les cheveux, comme des perruques posées sur du rose. Avec le temps, je retrouverai successivement les fronts, puis les yeux, puis la bouche. Un jour, je vivrai au milieu de photomatons ; il faudra attendre la dissolution complète de la bulle pour voir les gens en pied. »
« Je repousse le moment d'entrouvrir mes paupières. Je laisse juste filtrer la lumière, seul élément du monde qui me parvienne encore, le pâle liseré qui borde mes cils. J'attends. Puis comme un papier dont on déplie la blancheur pour trouver un message, je déploie mes paupières : la page est blanche.
Alors je referme mes yeux et me prépare à une nouvelle journée.
Une journée où il me faut réapprendre chaque geste comme une première fois empêchée. »
« Je ne fréquenterai plus mon image pendant de longues semaines. On vit très bien sans son reflet.
Ce qui manque cruellement, c'est le visage de ceux qu'on aime.
On dit parfois qu'on a senti une présence. La présence fera donc office d'image ; la mémoire sera son interprète. Je reconstitue vos traits invisibles, et je vous vois, les yeux fermés. Quant à la mobilité de vos expressions, je la suis, je la devine, aux inflexions de vos voix.
Partition de l'âme, la voix dit tout. Même la plus contrôlée, parle de votre chagrin à me voir diminuée, trahit par sa fausse gaîté votre souci de masquer votre angoisse, révèle en affectant de la minimiser, l'étendue du désastre. »