Fiche technique
Format : Broché
Nb de pages : 409 pages
Poids : 1100 g
Dimensions : 17cm X 25cm
ISBN : 978-2-35311-051-3
EAN : 9782353110513
Quatrième de couverture
Des bébés projetés sur catalogue et customisés en laboratoire aux défunts que l'on thanatopraxie avant de les incinérer en passant par le relooking de l'espace privé et public, tout est désormais affaire de design. La consonance anglaise de ce mot, qui s'est imposé sur toute la planète dans la seconde moitié du XXe siècle, témoigne d'un changement de vision du monde beaucoup plus profond qu'il n'y paraît.
Si la plupart des historiens font naître le design au début du XXe siècle d'une synthèse entre la tradition socialiste utopiste de William Morris qui veut guérir l'Angleterre déshumanisée par une industrialisation à tout-va grâce à la beauté des arts décoratifs, celle du Werkbund de Muthesius qui donne à la production industrielle un souci de beauté ergonomique et celle du Bauhaus de Walter Gropius qui favorise la formation d'artistes-artisans-ingénieurs-esthéticiens, ils oublient presque toujours le «back again» de Warhol, designer puis artiste, célébrant la beauté des Boîtes Brillo d'Harvey, artiste puis designer.
En prenant la place de «l'artiste-phare-messie» des avant-gardes modernistes dans les années soixante, l'artiste designer s'est retrouvé le seul à même de répondre à l'irrépressible désir de beauté de l'être humain. Il est ainsi devenu une «popstar» qui «change le monde», quitte à le faire tourner en boucle, de révolution esthétique en révolution esthétique, en mettant en oeuvre, entre cynisme et humour, «un design pour la vie».
À bien des égards, ce design pour une vie meilleure relève du pharmakon du Phèdre tout à la fois poison et remède, bouc émissaire et guérisseur, comme nous le donnent à comprendre, à rebours, les critiques de Papanek, Flusser ou Foster qui, à l'instar de celles de Platon contre les pasophoi, visent à faire des designers des sophistes apprentis sorciers, rusés, sournois et cupides. Il s'agit donc de distinguer le «bon design», qui maïeutise l'esprit écosophe de ses amateurs du «mauvais design», qui énerve sans fin les désirs pléonastiques de «l'homme pluvier» du Philèbe.
Quels critères, poïétiques et esthétiques, utiliser pour distinguer ces gestes de design ? Comment inviter leurs destinataires à faire des expériences «somaesthétiques» qui leur donnent envie de devenir les acteurs du beau monde pour tous et par tous rêvé par Morris ? Comment différencier le souci esthétique de soi, pluriel et jubilatoire, du surhomme artiste de Nietzsche de celui, pluriel et mortifère, du Clay psychotique de Bret Easton Ellis ? Comment distinguer la philosophie d'un design global pour la vie de sa tentation idéologique d'un design total ?