I comme Isidore

Du simple légionnaire brûlé par le soleil d'Afrique aux officiers blanchis sous le harnois, la Légion étrangère a toujours été riche en figures hors du commun. Mais plus rares ont été ceux qui ont su raconter ce qu'ils ont vécu, sans trahir ni enjoliver la vérité, sans altérer la fraîcheur des sensations et des émotions. Le général Jean Hallo est incontestablement de ceux-là. La publication de ses souvenirs de guerre constitue donc un événement.

Le général Hallo révèle ici un triple talent : celui d'un mémorialiste précis et scrupuleux, celui d'un moraliste exigeant mais généreux, enfin, celui d'un écrivain dont la plume alerte, vivante et colorée ne sacrifie jamais à la «langue de bois» militaire. Un authentique écrivain légionnaire !

Sorti de Saint-Cyr en 1939, le sous-lieutenant Jean Hallo obtient son affectation à la Légion. Envoyé à Sidi Bel-Abbès, il ne peut participer aux combats de 1940, et c'est le cœur serré qu'il assiste de loin à la débâcle. Il consacre alors toute son énergie à la préparation de la revanche. Cette période qui va de l'Armistice au débarquement en Afrique du Nord reste encore aujourd'hui largement méconnue. Elle occupe toute la première partie du livre et sera, pour la plupart des lecteurs, une révélation. L'auteur dépeint ce que fut alors l'état d'esprit d'une Légion étrangère qui rongeait son frein tout en fourbissant ses armes, et nous livre au passage d'admirables portraits de légionnaires, comme cette forte tête rescapée des Bat'd'Af dont il sut gagner la confiance et qui, blessée dans les Vosges, ne voulut pas mourir avant de lui avoir «serré la paluche»

La seconde partie du livre nous fait vivre l'épopée du RMLE, le régiment de marche de la Légion étrangère, avec la compagnie des «Isidore», ainsi appelée du nom de son indicatif radio. La bataille des Vosges, la campagne d'Allemagne, la victoire... Autant d'étapes glorieuses et souvent douloureuses que le général Hallo évoque avec la simplicité et la pudeur des vrais héros. C'est sur le retour en Afrique du Nord que s'achève ce livre qui prendra désormais place parmi les classiques de la littérature militaire.