Intime corruption

Le 19 mars 1996, un juge d'instruction du tribunal de grande instance de Grasse place en détention provisoire Gérard Lhéritier, propriétaire d'une société philatélique ayant ses bureaux à Nice. Il est soupçonné d'avoir abusé ses clients, en les incitant à investir dans des timbres « blocs-feuillets » de Monaco. De petits épargnants à qui il aurait fait miroiter la perspective de plus-values prodigieuses en un temps record. Montant de l'escroquerie alléguée : plusieurs centaines de millions de francs !

L'« affaire des timbres rares de Monaco » débute. Les médias lui consacrent leurs unes. Le juge d'instruction se félicite d'avoir démasqué une vaste affaire de corruption qui impliquerait le prince Rainier III en personne et même l'État français, puisque l'Imprimerie nationale est un maillon de la chaîne.

Mais la machine judiciaire s'emballe. D'accusé, Gérard Lhéritier devient bouc émissaire. Fausses déclarations, reportages télévisés à charge, rien n'est laissé au hasard par l'obscure camarilla qui a juré sa perte. En 2000, la rétractation d'une vraie fausse plaignante dévoile le montage, impliquant un juge d'instruction, un inspecteur de police et un ancien courtier de Gérard Lhéritier. Lequel, avant que soit pleinement reconnue son innocence, aura vécu pendant dix ans un rocambolesque imbroglio judiciaire, dont le récit se lit comme un roman d'espionnage - mais aussi comme les tribulations d'un honneur bafoué.