La foi des montagnes

La Savoie est réputée être une terre de catholicité. Sa culture a effectivement été marquée par une forte religiosité. On en trouvera ici de nombreux exemples. La personnalité de François de Sales, la fondation des Visitandines, la sainteté de ses religieux et de ses évêques, la dévotion tant de ses ducs, et leurs pompes baroques lors de leurs obsèques, que de ses élites diocésaines et du sénat de Chambéry, la ferveur du pèlerinage à Notre-Dame-de-Liesse à Annecy plaident dans en ce sens. Mais rien n'est jamais figé ni univoque. Du XVI^e au XVIII^e siècle, la vie culturelle et religieuse ne fut pas toujours sereine en Savoie. Le contexte y est souvent dramatique avec des guerres et des occupations étrangères fréquentes.

Le clergé y était parfois délinquant, appauvri, violent auprès des enfants dont il avait la charge. La défiance vis-à vis de Rome était institutionnelle. Les Savoyards eux-mêmes n'avaient pas toujours la foi ostentatoire qu'on croit, comme le montrent leurs livres intimes, et étaient plus pudiques dans leurs pratiques qu'on ne l'imagine souvent ; les enfants abandonnés y ont souvent une destinée tragique. Les voyageurs étrangers qui se rendent à Rome ou à « Chamouny » les jugent parfois sévèrement. C'est ce constat ambivalent qui est présenté ici.