La gay révolution

Après une carrière de journaliste de cinéma à Cinémonde où il impose l'érotisme au masculin, non sans provoquer les railleries, les quolibets de ses confrères hétéros, (une idée pareille ne pouvant germer que dans l'esprit d'un «pédé» en 1950), cette révoltante homophobie lui donne le courage de lancer, dans les années 60, risquant ses économies et le courroux de la censure, des revues homosexuelles : Eden, Olympe, Hommes, In, superbement affichées dans tous les kiosques de France, au grand émoi de la police mondaine qui le convoque chaque trimestre pour lui demander de supprimer des rubriques qu'elle juge provocantes ou licencieuses.

Guénin reçoit un énorme courrier d'homosexuels, surpris et heureux de trouver dans la presse, des journalistes qui osent répondre à leur attente et à leur désarroi. Leurs lettres traduisent une grande solitude, une véritable angoisse et c'est un honneur pour Guénin que de leur apporter aide, convivialité et du rêve avec de superbes photos érotiques. Il les informe de toute l'actualité des arts, des spectacles, des livres gays dans In magazine et sur les lieux de rencontres dans le précieux Guide In, ce qui lui vaut deux interdits en 1978, (In et Olympe) sous Giscard d'Estaing et la mise en péril de ses éditions.

Qui, mieux que lui, image pionnière des années 60, régnant en kiosques jusqu'à 1995, pouvait consacrer un livre à la Gay Révolution ? Guénin commente chaque fait, chaque date qui contribuent à une avancée vers une libération de plus en plus effective : les premières luttes aux Etats-Unis, en Allemagne, puis en France. Il accompagne cette liste d'événements importants pour la cause gay, du récit, souvent plein d'humour, de ses aventures homosexuelles, notamment avec les stars, du temps de Cinémonde, le tout illustré de photos qui restituent le climat des années 20/40, celles de la répression 50/70 jusqu'à l'amorce d'une vraie libération (80/2000). Encore juge-t-il prudent de ne pas crier victoire car l'homophobie est latente dans la population hétérosexuelle (92 %) face à la minorité homosexuelle (8 %).