Fiche technique
Format : Broché
Nb de pages : 313 pages
Poids : 520 g
Dimensions : 16cm X 24cm
EAN : 9782845868182
La région alaouite et le pouvoir syrien
Quatrième de couverture
Population rurale pauvre, taxée d'hérésie, en butte à l'hostilité de la bourgeoisie urbaine, les alaouites étaient encore considérés, dans les années 1930, comme des «attardés de l'histoire» (J. Weulersse). Trois décennies plus tard, ils font une entrée éclatante sur le devant de la scène syrienne et proche-orientale avec le coup d'État de l'un des leurs, Hafez Al Assad. Le berceau territorial de la communauté alaouite, longtemps sous-développé, devient le vivier des hommes forts du régime.
En analysant les dynamiques à l'oeuvre dans le destin d'une région syrienne, sur quelques décennies, ce livre dessine une étonnante histoire de territoire et de pouvoir.
Le pays alaouite, sur la frange côtière de la Syrie, hérite de la période ottomane un statut de périphérie lointaine, une situation de quasi-relégation. Unique fenêtre maritime du pays, il reçoit finalement l'attention des dirigeants baathistes à partir des années 1960. Les politiques volontaristes d'aménagement du territoire désenclavent cet espace: il devient une région intégrée.
Mais dans la Syrie baathiste, la politique territoriale est indissociable d'une volonté de contrôle central. Pour la région côtière, il apparaît de plus en plus clairement qu'avec Hafez Al Assad, la contrepartie de l'intégration, c'est la clientélisation. Choyée par le régime, la communauté alaouite en est dépendante. Cette relation est un facteur essentiel de la production du nouvel espace régional, et révèle avec une acuité particulière l'ambiguïté fondamentale d'un régime qui, malgré un discours laïc d'unité nationale, joue sur des lignes de fracture communautaires. L'intégration régionale prend en effet des allures de revanche des campagnes alaouites sur les villes sunnites. Les alaouites jouissent d'un accès privilégié à l'emploi et aux postes de direction dans le secteur public industriel, dans l'administration et dans l'armée. L'économie privée en revanche leur reste peu ouverte.
Aussi la timide libéralisation déclenchée dans les années 1990, prélude au «capitalisme des copains» de la Syrie d'aujourd'hui, va-t-elle renvoyer une partie de la communauté alaouite aux limites de son intégration. Tandis que la nouvelle configuration économique réactive la bourgeoisie industrielle et commerçante sunnite et chrétienne, l'affaiblissement des moyens de l'État remet en question les opportunités sociales offertes aux alaouites.
Tout se passe comme si la région côtière, à l'image de la communauté alaouite elle-même, se trouvait à l'aube d'une nouvelle périphérisation dans l'espace politique et économique syrien.