Le dernier voyage de Michel de Montaigne ?

À l'été 2018, une investigation menée sur une structure bâtie sur deux niveaux et conservée dans les sous-sols du Musée d'Aquitaine à Bordeaux (Gironde) a permis de découvrir, dans la chambre supérieure, un cercueil en bois portant une plaque métallique sur laquelle était gravée « Michel de Montaigne ». Deux phases successives de fouille en 2019 et 2020, sous la direction d'Hélène Réveillas, ont conduit à l'extraction et à l'ouverture de ce cercueil en bois. Il renfermait lui-même un contenant funéraire en plomb assez bien conservé, uniquement abimé au niveau de sa partie inférieure et qui laissait entrevoir par certains orifices des ossements humains obéissant à une logique anatomique. Un projet scientifique collectif (PCR) a été mis en place afin de tenter d'identifier le défunt, dévoiler le traitement funéraire appliqué et discuter du devenir exact du corps d'un grand philosophe, mais cette recherche avait aussi pour objectif de mieux comprendre le paysage culturel et économique de Bordeaux depuis la seconde moitié du XVI^e siècle jusqu'à la fin du XIX^e siècle. Une équipe interdisciplinaire d'une vingtaine de personnes a ainsi été réunie, regroupant des spécialistes en archéo-anthropologie, en archéologie du bâti, en archéogénétique, en archéobotanique, en histoire, etc.

Malgré toutes les analyses et recherches menées, la détermination de l'identité du défunt mis au jour dans le sarcophage en plomb n'a pas pu être réalisée. Cependant, un faisceau d'indices concordants permet de penser qu'il existe malgré tout une probabilité assez élevée que ces restes osseux appartiennent bien au philosophe, tant au niveau des résultats biologiques que funéraires. Présentés dans le cadre d'une journée d'étude organisée à Bordeaux le 8 novembre 2022, les nombreux résultats inédits obtenus (mode de construction du sarcophage, embaumement, reconstruction faciale, ...) apparaissent d'ores et déjà fondateurs pour l'étude des funérailles des familles aisées de la période moderne dans le nord de l'Aquitaine.

In the summer of 2018, an investigation carried out on a two-storey structure housed in the basement of the Musée d'Aquitaine in Bordeaux (Gironde) uncovered, in the upper chamber, a wooden coffin bearing a metal plate engraved with « Michel de Montaigne ». Two successive phases of excavation under the direction of Hélène Réveillas, in 2019 and 2020, led to the extraction and opening of this wooden coffin. It itself held a well-preserved lead funerary container, damaged in its lower part only and revealing anatomically logical human bones through certain orifices. A collective scientific project was set up to attempt to identify the deceased, reveal the funerary treatment applied and discuss the exact fate of the body of a great philosopher. This research also aimed to better understand the cultural and economic landscape of Bordeaux from the second half of the 16th century to the end of the 19th century. An interdisciplinary team of some twenty people was assembled, bringing together specialists in archaeo-anthropology, building archaeology, archaeogenetics, archaeobotany, history and more.

Despite all the analysis and research carried out, it has not been possible to determine the identity of the deceased uncovered in the lead sarcophagus. However, several concordant clues suggest that there is a fairly high probability that these bone remains are indeed those of the philosopher. in terms of both biological and funerary findings. Presented as part of a symposium in Bordeaux on 8 November 2022, the many new results (sarcophagus construction method, embalming, facial reconstruction, etc.) now appear fundamental to the study of the funerals of wealthy families of the modern period in northern Aquitaine.