Le passeur de rêves

Le Passeur de rêves

Naguère, j'ai parcouru des sentes perdues au milieu de nulle part. Souvent, ces promenades buissonnières me conduisaient à la découverte de lieux étranges, chargés de mystère, où le silence n'était violé que par le souffle des vents qui venait griffer la bruyère et les quelques feuillus qui habillaient l'espace infini de la lande.

De ce temps d'adolescence, j'ai conservé le souvenir de mille parfums mêlés qui émanaient de cette étendue sauvage qui ressemblait à une terre abandonnée aux caprices des quatre saisons.

Dans la solitude de cette campagne oubliée, des odeurs venues du lointain m'ont été offertes, ajoutant encore au spectacle grandiose d'une nature secrète, au charme indicible.

Aujourd'hui, je garde en moi ces parfums de mûriers, d'aubépines, de cette terre mouillée par les pluies d'orage. Je conserve jalousement les senteurs descendues des chênes centenaires, des mélèzes, de l'herbe folle qui dansait la sarabande aux confins des tourbières.

Comment ne pas voir une certaine analogie entre ces effluves qui sont restées accrochées au plus profond de ma mémoire, et ces histoires qui m'ont été racontées, murmurées, suggérées, et dont mon imaginaire s'est empressé de polir la trame ?

Pareilles à ces fleurs sauvages cueillies au gré d'une humeur vagabonde, elles se révèlent poétiques, provocatrices, parfois rebelles, à l'image de ces odeurs qui embaument encore aujourd'hui les sentes de mon pays d'Oc.