Les jardins secrets d'Anne de Bretagne

Féministe, européenne et mécène, la duchesse Anne de Bretagne fut par deux fois reine de France par ses mariages successifs : avec Charles VIII en 1491, puis avec Louis XII en 1499.

Cette femme de tête au caractère inflexible mais au grand coeur eut un destin tragique jusqu'à sa mort à Blois en 1514. Blois sont port d'attache où son cercle de dames, ses poètes, ses musiciens, ses jardins embaumés enchantèrent les ambassadeurs de toute l'Europe, Blois d'où elle lança la mode d'une cour élégante et raffinée, <<gageant sur sa cassette>> artistes et rhétoriqueurs, architectes et liciers, brodeurs et verriers, chansonniers et bateleurs dont les rimes grotesques influencèrent même le mouvement surréaliste.

Pacifiste, cette marieuse correspondait avec tous les chefs d'Etat tout en protégeant les humbles, les artisans, les paysans, les plus démunis qui invoquaient encore à la Révolution le Père du Peuple et la Bonne Reine espérant se faire rendre justice contre l'oppression des puissants du royaume. Orgueilleuse avec les féodaux à qui elle fit rendre gorge, généreuse avec l'Eglise, elle créa de nombreux couvents dont les Minimes de Nigeon, commandant des cartons à Durer et Vinci pour leurs vitraux, dont elle raffolait.

Son féminisme actif, ses ambitions européennes mais surtout son sens inné de la communication en firent un véritable ministre de la culture restée parmi les plus populaires. Indomptable et sauvage à l'instar de la Loire, elle en personnifie les folles passions d'un sang espagnol et les colères tumultueuses d'un sang breton. Botaniste, Anne soignait ses époux par les plantes : le premier épileptique, le second goutteux lui laissèrent souvent la direction des affaires qu'elle menait d'une main de fer aidée du cardinal d'Amboise. A une époque de filtres et d'envoûtements, elle veillait jalousement sur le berceau de ses enfants que guettaient l'ombre de la mort et des empoisonnements occultes.

Geneviève-Morgane Tanguy par une enquête menée de Nantes à Langeais, à Amboise, à Blois et Lyon, ouvre la petite porte des jardins profanes et sacrés d'une enchanteresse élevée dans le merveilleux de la Matière de Bretagne et dont le logis d'amour est actuellement restauré à Blois.