Les relations des pays d'Islam avec le monde latin, du milieu du Xe au milieu du XIIIe siècle

Entre l'Islam, parvenue au début du dixième siècle à l'apogée de son expansion vers l'Occident en moins de trois siècles, et l'Europe latine dont la société, après la disparition de l'empire carolingien, se réorganise sur de nouvelles bases féodales et bénéficie d'une croissance soutenue, l'affrontement politique et militaire s'intensifie. Mais on aurait tort de réduire les relations qui ont pu s'établir entre les deux civilisations à la confrontation entre Croisés et Combattants d'Allah. Les conflits n'ont pas seulement concerné la Terre Sainte en Orient. Les guerres entre musulmans n'ont pas manqué non plus, et les conflits avec les Chrétiens n'ont pas été permanents. Des sources nombreuses attestent l'existence d'autres rapports, le développement d'échanges commerciaux et culturels entre populations voisines de la Méditerranée.

Ce recueil de documents s'efforce de rendre compte de la diversité et de la richesse des contacts, en reproduisant des témoignages des Musulmans et des Chrétiens, auxquels on s'est efforcé d'accorder une place équilibrée. Dans le choix, forcément arbitraire, quelques principes nous ont guidé. L'accent a été mis volontairement sur les lieux de contacts et les modalités de relations extérieurs aux Croisades, car les sources sur les expéditions des Latins en Orient ont fait déjà l'objet de nombreuses éditions, voire de traductions. On a privilégié la longueur des extraits narratifs au nombre, car elle correspond aux dimensions des documents commentés à l'agrégation et donnent plus de réalité et de profondeur aux faits observés. Cet aperçu présente d'abord quelques-uns des traits exemplaires du monde Musulmans que les Chrétiens commencèrent à découvrir au dixième siècle, qui constituent un arrière-plan permanent de ces relations, et introduit aux formes d'échanges commerciaux et culturels que les conflits n'interrompront jamais totalement. Les guerres qui opposent Musulmans et Chrétiens en deux secteurs principaux (Péninsule Ibérique et Terre Sainte), retentissent sur la perception de l'Autre. La troisième partie propose des sources qui mettent en valeur le contraste entre la vision idéologique, religieuse et littéraire du Sarrasin, d'autant plus négative qu'elle n'est pas directement confrontée à la réalité. et les formes de cohabitation plus ou moins organisées qui aboutissent, en certains pays de la Méditerranée, comme la Sicile ou le Levant espagnol, à des ébauches de sociétés multiculturelles, enrichies par les apports réciproques.