Ma sogona ma laide

Le Roi est mort, vive le Roi ! Mais lequel ? Maghan Kon Fatta n'est plus, deux prétendants se battent par mères interposées.

Sassouma Bérété l'aimée est belle de cette beauté appelée «la petite beauté blanche», celle qui manque de profondeur et se laisse percevoir de façon immédiate.

Sogolon est laide, mais de même qu'au fond de l'abîme se cache le métal précieux, de même sous sa bosse et les piquants acérés de son corps, se cache la beauté profonde de la femme noire.

Dans ce combat entre l'illusion et la lumière, entre le mirage et l'eau de roche, peu à peu la vérité s'installe et pâlit la «belle petite parole mensongère».

Pour présenter cette traversée du temps vers le grand Empire mandingue, Marie-José Hourantier brise la linéarité du récit et mêle le passé au présent, réveille des tranches de vie. Le langage étonne, séduit et dérange : du verbe imagé et poétique des griots à la parole familière du français populaire d'Abidjan, aux langues africaines nimbées de chants-sons et d'onomatopées.

La mise en scène explore le vivier culturel ivoirien. Le trône est akan, le jugement des épouses est krou, les chants sont mandingues, mossis et bétés. Les pas de danse, sur rythme de djembé vont de l'envolée classique aux chorégraphies africaines, en passant par la cadence du rock américain.

Voilà une histoire de femmes avec ses jalousies, ses commérages, mais aussi la douceur, la douleur, la réserve... Une histoire d'initiation, une histoire ancienne, une histoire moderne, une histoire tirée du melting-pot culturel ouest-africain qui constitue la personnalité et la grande richesse de la Perle des Lagunes.

Kalilou Téra.