Pasquale Paoli ou La déroute de Pontenovo

Dans le Pasquale Paoli de F.D. Guerrazzi, tout est grand. Grandiose et symphonique...

Les valeurs, tout d'abord. Portées par une multitude de héros, elles sont les plus élevées qui soient... la liberté, le droit, la justice, la morale, le respect du peuple, la haine de la tyrannie...

L'ambition littéraire, ensuite. Dans ce XIX^e siècle des lettres italiennes où les anciens peuvent enfin être dépassés et le roman moderne étendre ses ailes, elle est à la mesure des mille pages et du foisonnement parfois baroque de l'édition originale.

L'ambition politique, aussi. Car, pour l'auteur, la vie même est engagement. Comme la littérature. Comme la littérature. Comme le roman qui, par essence, est nécessairement révolutionnaire...

Les héros, enfin. À la (dé)mesure des héros antiques, les Corses se battent seuls contre le nombre, la force, la traîtrise et la barbarie. Ils sont l'âme incandescente du roman. Ils représentent le peuple universel. C'est pourquoi l'histoire elle-même prend des allures de geste magnifique peuplée d'une foule de personnages connus ou anonymes. L'Anglais Boswell, le vieux Giacomini, l'altier Altobello, le frère Bernardino, l'assassin Giovan Brando, l'avare Mariano, la belle Serena, Lella la vengeresse, Massesi le traître, Francesca Domenica la mère courage, sont autant de personnages qui restent gravés dans la mémoire bien après avoir refermé le livre...

De cette rencontre entre Guerrazzi le garibaldien et ce héros « à la Plutarque » que fut Pasquale Paoli au coeur du Siècle des lumières, jaillit un jour cette grande oeuvre littéraire où la noirceur du destin - la « déroute » - ne parvient pas à effacer l'amour de la vie, l'humour, la jubilation de la langue, les élans du coeur... et la foi en l'homme !