Richelieu et Olivares

Le cardinal de Richelieu est l'un des hommes d'Etat les mieux connus et les plus étudiés de l'histoire européenne ; son contemporain et rival espagnol, le comte-duc d'Olivares, l'un des plus méconnus. Le sort si différent que l'histoire leur a réservé est la conséquence de la grande bataille qui, au XVII^e siècle, mit aux prises la France et l'Espagne pour la domination de l'Europe. Le triomphe de la France assura la célébrité à Richelieu, tandis que la défaite de l'Espagne condamna Olivares aux oubliettes de l'histoire. Mais dans cet ouvrage, issu des conférences Trevelyan données à l'Université de Cambridge en 1983, le P^r Elliott soutient la thèse que, pour ses contemporains, Olivares n'était pas moins important que Richelieu, et qu'ils ne partageaient en aucune manière la certitude, acquise a posteriori, du déclin inévitable de l'Espagne et de l'ascension de la France. Notre vision rétrospective nous a amenés à négliger ou à déformer certains aspects essentiels du paysage politique de l'Europe du XVII^e siècle. Pour nous rapprocher du point de vue des contemporains, l'auteur a donc entrepris une étude comparative du cardinal et du comte-duc, en tant que personnalités et hommes d'Etat, accordant à chacun une égale attention. Il analyse leurs années de formation et leur ascension vers le pouvoir, les points communs et les différences entre leurs programmes politiques, les défis qu'ils eurent à relever et l'enchaînement des événements qui les amena à conclure que la première priorité était la défaite de l'autre.

Le résultat est une étude comparative approfondie de l'exercice du pouvoir et des capacités de l'homme d'Etat, exercice d'un type rarement tenté jusqu'ici. Il nous révèle beaucoup de faits nouveaux sur la personnalité et l'oeuvre d'Olivares, auquel le P^r Elliott a consacré une biographie politique complète ; et la personnalité pourtant bien connue de Richelieu nous apparaît par moments sous un jour bien différent lorsque mise en parallèle avec celle de son rival espagnol. Cet ouvrage nous oblige à porter sur la France et l'Espagne du XVII^e siècle un regard nouveau, et à nous poser la question que l'on se pose pour toute période de l'histoire, à savoir les causes et les raisons du succès ou de l'échec dans l'art de gouverner.