Fiche technique
Format : Broché
Nb de pages : 93 pages
Poids : 400 g
Dimensions : 15cm X 22cm
ISBN : 978-2-86965-195-1
EAN : 9782869651951
Traduire comme transhumer
Quatrième de couverture
À peine avais-je évoqué ce poète vietnamien avec son inséparable petit sac plein de livres et son rêve un peu fou de le traduire, que René Char me versa alors un deuxième verre de lumière et déjà se levait et revint les mains pleines de poèmes. De sa fine et longue écriture de noirs cyprès penchés sous le mistral, il traça sur les pages de garde des paroles comme une main tendue, et me dit d'embrasser pour lui son frère en poésie.
Je repartis avec ces trésors dans ma sacoche ou plutôt ma «biasse» de berger car cette petite route de Provence me parle de la transhumance : ce grand et long passage des troupeaux vers des terres lointaines. Pour trouver aux saisons venues les plus belles herbes, celles des plaines basses en hiver et des hautes vallées en été - drailles antiques des rencontres et des échanges dans tous les parlers de cette «langue-toit» qu'est le provençal. Ainsi de ces chemins transhumants de la traduction, ce lent et patient passage, toutes frontières abolies, d'un pays à un autre, d'une culture à une autre, d'une langue à une autre.
Mireille Gansel
La disparition de la langue universelle, celle que Walter Benjamin qualifiait de «langue parfaite» ou de «langue pure», en référence au mythe de Babel, condamne les hommes à refaire éternellement le chemin qui les sépare. Car depuis ce temps biblique où l'humanité, nous dit-on, était une : «oui, un seul peuple, une seule lèvre pour tous», les langues se sont multipliées, divisant les groupes, les empêchant de communiquer, entraînant la discorde, les conflits et les guerres. Aussi la tâche des traducteurs qui rétablissent les conditions de l'échange, autant que celle des poètes dont le pouvoir est d'aller au plus près de la langue universelle, sont-elles devenues essentielles. À la recherche d'un monde plus humain, dans ce parcours qui va de l'auteur au lecteur et régénère autant qu'une transhumance, s'inscrit la quête de Mireille Gansel.
Jean-Claude Duclos