Un jardin à Ninon

« J'étais passé plusieurs fois devant ce petit chemin sans l'emprunter. La maison était là, la deuxième sur la droite. En descendant du véhicule, trois détails avaient attiré mon attention : les volets bleu canard, les arcs sur la façade et les souliers magnifiquement cirés de l'agent immobilier. Le jardin ? Non.
Il était propre autour du bâtiment, peu fleuri et se transformait en grande friche à l'arrière où des peupliers malingres venaient d'être plantés. C'était un no man's land qui devait le rester.
Un an plus tard, un soir du mois de mai, après avoir tondu la partie civilisée du jardin, je décidai de tracer un chemin dans cette friche. Pour voir. Geste qui fut loin d'être anodin en raison de la densité des herbes, de leur hauteur et qui aurait dû être dissuasif. Ce fut tout le contraire. J'ai le souvenir d'une bande dessinée de mon enfance où les méchants sont enfermés dans le bagne de Sing-Sing afin d'y travailler sans relâche. En traçant cette allée, je me procurais les clefs de Sing-Sing et m'y enfermais »