Jean Chardin est né à Paris le 26 novembre 1643 et mourut près de Londres le 26 janvier 1713. Fils d'un joaillier de la place Dauphine et bijoutier lui-même, il n'avait pas atteint l'âge de 22 ans, que son père l'envoyait aux Indes orientales pour des opérations relatives au commerce des pierres précieuses. Il traversa la Perse, visita Surate, Ormuz, et revint à Ispahan où il demeura six ans. Le schah le nomma son marchand, titre qui donna à Chardin l'occasion de fréquenter tout ce qui comptait à la Cour et de recueillir les renseignements les plus curieux et les plus authentiques sur le système politique et militaire de la Perse. Il voulut apprendre les différents idiomes du pays, ce qui lui permit de s'informer directement sur les usages et les moeurs. Il visita deux fois Persépolis, et rassembla les matériaux les plus curieux sur les antiquités et les monuments. Un dessinateur qu'il avait amené le suivait dans toutes ses explorations et il put ainsi rapporter des reproductions exactes dont nous donnons quelques exemples dans cet ouvrage. De retour en France en 1670, il comprit que son appartenance à la religion réformée l'écarterait des affaires ; aussi décida-t-il de quitter Paris le 17 août 1671, avec une riche collection d'objets précieux. Il arriva en Perse deux ans plus tard, après mille aventures plus périlleuses les unes que les autres. Il devait y séjourner dix années, visita de nouveau l'Inde, et revint en Europe par le cap de Bonne Espérance en 1677. Les conséquences de la révocation de l'édit de Nantes l'incitèrent à se fixer en Angleterre, où Charles II lui conféra le titre de chevalier ; le même jour, notre chevalier épousait une demoiselle protestante de Rouen, que la crainte des persécutions avait déterminée à chercher un asile au-delà des mers. En 1683, il fut envoyé en Hollande comme agent de la Compagnie anglaise des Indes et comme ministre plénipotentiaire de Charles II. La première édition de ses voyages, publiée à Londres en 1686, relate son voyage de Paris à Ispahan. Ce récit que nous reproduisons ici pour la plus grande partie, est particulièrement intéressant en ce qu'il évoque une civilisation à son apogée, et nous savons par les commentaires des voyageurs qui visitèrent la Perse après Chardin, combien étaient fiables, justes et profondes ses observations, variées ses connaissances ; c'est d'après ses études que Montesquieu, Rousseau, Gibbon, Helvétius, entre autres, ont étudié le système politique de la Perse.